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Extrait de l’ouvrage de Daniel Leunens " Ambleteuse 1870-2000 Une histoire moderne"

Editions A.M.A / Histopale

 cliquez sur la première image pour découvrir une iconographie plus complète

 Le Parc aux Huîtres

 

Le parc en 1939 . Les bâtiments d’exploitation

Le Parc à Huîtres d’Ambleteuse est une originalité qui a contribué à la renommée du village. Contrairement à une idée largement répandue, il n’est pas une conséquence de l’essor touristique car le parc existait bien avant la construction des premières villas.

Préserver la fraîcheur des huîtres s’était avéré indispensable pour la table renommée d’Augustin Delpierre . On avait donc trouvé très simple de conserver les huîtres achetées à Boulogne (Cancale et Arcachon) et celles pêchées sur les bancs devant Ambleteuse et Boulogne, dans des grandes bourriches déposées dans la baie. Evidemment, il y avait eu des vols et l’endroit dut être gardé.

Le boulanger d’Ambleteuse, Jules Héquet tenta de rationaliser et surtout d’augmenter la capacité de stockage des huîtres ; il clôtura un premier bassin. L’administration des Domaines et celle de la Marine exigèrent alors une demande en bonne et due forme d’occupation du domaine public maritime ; ce n’était guère dans les compétences de Jules Héquet qui fit appel à un de ses four­nisseurs d’Arcachon : M Coquebert de Neuville.

 

Le trait plein limitant la baie d’Ambleteuse (sur ce croquis et le suivant) est la laisse de pleine mer du 12 mars 1891 à midi 42′, proposée pour la délimitation du rivage maritime (Décret du 10 décembre 1892)

Un arrêté du ministre de la Marine en date du 16 mai 1882 accorda au sieur Coquebert de Neuville l’autorisation d’occuper le domaine maritime aux fins d’y exploiter un parc aux huîtres. Jules Héquet se trouvait engagé commercialement ; il dut à son tour demander une autorisation de location du parc, accordée par le Préfet du Pas-de-Calais le 8 septembre 1888.

Il faut croire que Jules Héquet n’appréciait guère la paperasse ; il dépose le 6 septembre 1890 une renonciation à son exploitation. M. VOISIN, ingénieur ordinaire des Ponts et Chaussées maritimes conclut : "L’ouvrage est situé dans le fond de l’ancien port d’Ambleteuse, sur la rive droite de la rivière La Slack; s’il est abandonné, cet ouvrage peut dans l’avenir, présenter des inconvénients soit par  la circulation, soit pour la navigation en canots, soit même au point de vue de la salubrité et de sécurité publiques.

C’est pourquoi nous estimons qu’il y a lieu, si l’autorité maritime accepte le désistement sieur Haquet de prescrire au concessionnaire la destruction des constructions et établissement, digues, bassins, etc. constituant le parc à huîtres d’Ambleteuse et d’ordonner le rétablissement lieux dans leur état primitif. Ce travail devrait être exécuté par le sieur Héquet dans un délai six mois…"

Ce premier parc à huîtres, une fois démoli aurait probablement oblitéré toute activité ostréicole ultérieure. Cependant, le 20 octobre 1892, Monsieur Bouret pharmacien à Saint-Denis, (Seine) saisit le conseil municipal d’Ambleteuse d’une demande de création d’établissement ostréicole sur une superficie de 10 hectares. L’assemblée approuve le projet, considérant qu’il "nécessiterait l’emploi de bon nombre d’ouvriers et procurerait ainsi un peu d’aisance dans le pays en donnant du travail à beaucoup d’habitants qui n’en ont pas...". Seul Monsieur Friscourt fit observer que 4 hectares seraient suffisants.

Le 10 juin 1893, Ernest Bouret obtient par arrêté ministériel l’autorisation de créer un parc à huîtres ; il occupe évidemment la partie laissée par Jules Héquet, en augmente un peu la surface pour obtenir un bassin de 135 m de long sur 35 de large. Il obtient également une concession du domaine public maritime de 3,75 hectares.

 

Monsieur Bouret qui demeure maintenant rue Basse des Tintelleries à Boulogne va se constituer en société avec Alexandre Vidal du Plessis rentier, demeurant à Arcachon et Romain Chardonneau, rentier demeurant à Paris.

Le nouvel établissement va connaître des difficultés de fonctionnement liées essentiellement au renouvellement de l’eau du bassin d’engraissage aussi en avril 1896 demandent-ils l’édification d’une digue: "cette digue barrage nous est indispensable pour garder de l’eau pendant les grande chaleurs ou les grands froids et sans elle les risques à couvrir deviennent énormes."

Le croquis joint au dos de la demande est explicite :

 

Cette digue est presque terminée lorsque les tempêtes de printemps la détruisent en grande partie ; des milliers d’huîtres sont également dispersées et la perte est considérable. C’est le moment que choisit Ernest Bouret pour disparaître et la société Vidal du Plessis, Bouret et Chardonneau est dissoute par jugement du 26 mai 1897 prononcée par le tribunal de commerce de Calais.

Le sort s’acharne et Vidal du Plessis décède. M. Chardonneau rachète donc tout le matériel de l’exploitation, et maintient en l’état le parc en attendant l’octroi d’une nouvelle autorisation de fonctionnement. Cette autorisation accordée, le parc à huîtres va commencer une période de développement considérable.

Dessin de V.J Vaillant B.M Boulogne sur Mer

  M. Chardonneau va établir un restaurant le long du bassin. On y servira non seulement des huîtres mais également des homards et langoustes conservés en viviers. Une nouvelle spécialité viendra s’ajouter au menu : « l’inédite omelette ». Inédite elle restera puisque la recette en a été perdue.. au grand regret des personnes qui ont connu cette gourmandise.

   M. Chardonneau décède en 1918 ; vont se succéder M. Piettre puis M. Armand Labouré et enfin M. François Trabuchet déjà établi dans le commerce du poisson à Boulogne sur Mer. Une nouvelle période faste va commencer pour le parc qui attire de plus en plus de visiteurs. Le parc aux huîtres fera une victime, non par noyade comme on pourrait l’imaginer mais par la foudre. Le 12 août 1935, Roger Cuvillier, âgé de 20 ans, déplace dans le bassin les casiers avec une gaffe. L’orage gronde et soudain, à 14h50 un éclair frappe mortellement le jeune homme.

 

 

Le parc vers 1935 à marée haute

Le parc vers 1935 à marée basse

Vue aérienne du parc en 1938

 Le parc en 1939 – Vue générale

 L’occupation allemande aura pour conséquence le saccage des bassins et des bâtiments dont les matériaux sont récupérés pour les constructions militaires.

En 1965, la concession est reprise par la Société des Pêches de la Morinie, issue de la Société Trabuchet. En 1968, on tente de réaliser un centre de stockage régional pour les huîtres et d’importants travaux sont réalisés pour réaménager les bassins. Malheureusement la pollution importante de la Slack avec une haute teneur en bactéries pathogènes rendra impossible la mise en bassin des huîtres comme des crustacés.

De nos jours, le bassin de 1968 subsiste ainsi que les levées de terre correspondant aux digues. On y observe une faune abondante qui bénéficie de l’isolement des lieux.

Le parc à huîtres en 2005

 

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